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Main » 2008 » August » 9 » Alexandre le grand
Alexandre le grand
8:49 PM

Alexandre III le Grand






 


Alexandre le Grand
British Museum

L'épopée

Roi de Macédoine (336-323 av. J.-C.).
Alexandre III le Grand, maître de la Grèce, de l'Egypte et de l'Asie, est l'un des personnages les plus illustres de l'histoire universelle. Ses exploits, évoqués par la Bible et le Coran, sa gloire entretenue et célébrée en Orient comme en Occident en font un héros et une figure de légende.

Fils d'Olympias, princesse d'Epire, et de Philippe II, roi de Macédoine, Alexandre III le Grand reçoit une éducation princière et a pour précepteur Aristote. Adolescent, il donne toute la mesure de son talent militaire en assumant, en 340, la régence du royaume macédonien et en s'illustrant dans la guerre contre les Thébains (bataille de Chéronée en 338). Roi de Macédoine à vingt ans, il consolide les frontières du royaume, pousse jusqu'au Danube, soumet les Thraces et neutralise les Illyriens. En Grèce, il impose sa loi aux cités d'Athènes et de Thèbes et, en 335, reforme à son profit la ligue de Corinthe.  

La progression en territoires perses

Commence alors pour Alexandre une longue aventure qui, en un peu plus d'une décennie, va le mener sur les bords de l'Indus et de l'Oxus. Reprenant le projet formé par son père d'une «guerre de représailles» contre les Perses, il franchit l'Hellespont et débarque en Troade avec 30'000 fantassins et 5'000 cavaliers. Des succès rapides lui permettent de libérer les cités grecques et de triompher des soldats du Grand Roi des Perses, Darius (bataille du Granique, juin 334). Depuis la cité de Gordion - où il tranche le légendaire nœud gordien, geste qui lui promet la possession de l'empire d'Asie -, Alexandre progresse à l'intérieur des territoires perses. En automne 333, il occupe les villes côtières de Syrie et de Phénicie.  

La «libération» de l'Egypte

La prise de Gaza lui ouvre la voie de l'Egypte, où il pénètre en décembre 332. Le pays des pharaons l'accueille en libérateur; en retour, Alexandre multiplie les gestes politiques: sacrifices au dieu Apis, pèlerinage au sanctuaire d'Amon, à Siouah, où les prêtres lui confèrent le titre de «fils d'Amon». En janvier 331, il fonde sa première ville coloniale, Alexandrie, qui va devenir pendant des siècles un brillant centre de l'hellénisme. D'Egypte, Alexandre gagne ensuite la Mésopotamie, où il triomphe définitivement de Darius dans la plaine de Gaugamèles (octobre 331).  

Le roi de l'Asie

Après les prises de Babylone, Suse, Persépolis, Pasargades et Ecbatane, il est consacré roi d'Asie et héritier des Achéménides. La «pacification» de l'Asie centrale, qui nécessite près de trois ans (329-327), s'étend à l'Hyrcanie, l'Arie, l'Arachosie, la Bactriane, la Sogdiane et porte Alexandre jusqu'aux «bornes de Bacchus», limites septentrionales de l'oikoumenê (terme grec qui désignait l'ensemble des terres habitées, et, dans ce cas précis, le Caucase). Le long de sa route, le conquérant crée de nombreuses Alexandries dont certaines portent aujourd'hui les noms de Harat, Kandahar, Samarkand.  

En 327, l'aventure se poursuit au-delà des passes de l'Hindou Kouch. Dévalant dans la plaine, Alexandre traverse l'Indus en 326 et, au terme d'une bataille contre l'armée du roi indien Paurava, occupe la région du Pendjab, où il crée les colonies grecques de Nicée et de Bucéphalie. Le retour, en juillet 326, se fait le long de la vallée de l'Indus. Arrivée à Pattala en 325, l'armée se scinde en trois fractions: l'amiral Néarque rentre par mer à travers le golfe Persique; Cratère ramène une deuxième partie des troupes par les passes du Bolan; Alexandre emprunte les déserts de Carmanie et de Gédrosie.  
 



L'œuvre

Rentré à Babylone en 323, Alexandre se préoccupe de l'organisation de son empire.  

La fusion entre vainqueurs et vaincus
Alexandre rompt avec l'idéal hellénique qui préconise la distinction entre Grecs et Barbares en tentant une politique de fusion entre ses nouveaux sujets et les anciens. Il copie la monarchie achéménide, se dote d'une cour et, à la grande indignation des Grecs, impose le cérémonial de la prosternation («proskynèse»). Inversement, il fait éduquer à la grecque près de 30'000 enfants perses. Pour gérer ses territoires disparates, Alexandre fait appel aux Grecs, aux Perses et aux indigènes, avec cependant prépondérance des premiers dans les domaines militaires et financiers. L'unité administrative demeure la satrapie achéménide, sauf à l'est, où sont créés de grands commandements militaires. Le système financier est unifié par l'adoption d'une monnaie impériale, la drachme d'étalon attique, qui remplace les dariques, plus lourdes.

La politique économique

La politique économique se révèle des plus hardies. Elle se fait pour l'essentiel en cours de conquête: dans chaque région conquise, Alexandre prend soin de recenser les richesses et d'explorer les voies maritimes, fluviales et terrestres. Ainsi, en Egypte, en 331, il organise une mission scientifique chargée d'étudier la crue du Nil; en Inde, il fait explorer le delta de l'Indus, étudier la flore, la faune, le sous-sol et même dresser des cartes; en Babylonie, à son retour, il édifie un grand port. Sa mort prématurée, en juin 323, met un terme à ses projets de conquête des côtes du golfe Arabo-Persique et d'Arabie. Les Alexandries, ces avant-postes de l'hellénisme, participent aussi de cette volonté d'exploiter des pays dont la richesse est avant tout fondée sur l'importance des ressources naturelles.


Le mythe d'Alexandre

L'histoire d'Alexandre est aussi celle d'un mythe né dans l'Antiquité et entretenu par les historiographes orientaux et occidentaux.  

L'historiographie antique  

La Grèce
Ce sont d'abord Onésicrite et Callisthène, compagnons du conquérant lors de l'expédition d'Asie qui, dans deux panégyriques, posent les premiers jalons de la légende. Peu après, Clitarque d'Alexandrie, historien grec du IV
e   siècle av. J.-C., écrit une Histoire d'Alexandre qui, truffée de fables, tient plus du roman que de la biographie. Ce fut le premier d'une série d'ouvrages qui vont peu à peu sous-tendre, dans le monde oriental puis occidental, tout le mythe alexandrin. A l'inverse des Grecs d'Orient qui glorifièrent Alexandre, Sparte, Thèbes et Athènes dénièrent tout mérite au «jeune homme de Pella». Lui reprochant la mort de Callisthène qui fut de leur école, les péripatéticiens entreprirent à son encontre une campagne haineuse, puis, délibérément, l'ignorèrent. Les auteurs comiques le traitèrent d'ivrogne et le raillèrent. Les stoïciens firent de même, insistant sur son penchant pour la luxure et l'argent. Mais Plutarque de Chéronée atténuera la longue impopularité du Macédonien, et Arrien (IIe s. apr. J.-C.), dans son Anabase, le réhabilitera.  

L'Egypte
C'est à ses premiers historiens, mais aussi aux Ptolémées, rois grecs de l'Egypte, que revient la part la plus importante dans la formation du mythe. Ces derniers, pour conforter leur dynastie et renforcer leur pouvoir, usent à souhait de l'image d'un Alexandre égyptien, héros et divin à la fois. Le premier d'entre eux, Sôtêr, ancien lieutenant d'Alexandre et probablement le commanditaire du livre de Clitarque, frappe des monnaies à l'effigie du Macédonien (au lieu de celle d'Héraclès) et institue des Alexandreia (jeux). Ses successeurs vont affirmer le caractère divin du Macédonien par une assimilation à des dieux tels que Zeus, Poséidon, Héphaïstos, Hermès, Mithra, Dionysos, ou à des héros comme Héraclès et les Dioscures.  

Rome
D'Alexandrie, l'admiration pour le conquérant gagne progressivement Rome. En pleine deuxième guerre punique, Plaute y voit le modèle parfait du héros. Plus tard, sous l'Empire, Commode frappe monnaie à son effigie et Caracalla s'en inspire pour élaborer une «Constitution antonine» qui met sur pied d'égalité Orientaux et Occidentaux.  

La «nouvelle» histoire d'Alexandre

Mais l'Orient, et plus particulièrement Alexandrie, entendent rester maîtres de la légende. Vers 222, une Histoire d'Alexandre le Grand, faussement attribuée à Callisthène et probablement composée par des auteurs alexandrins, impose une nouvelle vision du personnage et de son épopée.  

Les changements chronologiques

Ce roman, traduit en latin vers 338-340 par Julius Valerius Polemius, transfigure pour plus de dix siècles l'image déjà dénaturée du Macédonien. Alexandre, écrit-on dans l'œuvre de ce pseudo-Callisthène, naquit de l'union d'Olympias avec Nectanebo, dernier pharaon d'Egypte qui, pour fuir l'armée du Perse Artaxerxès III, va se réfugier à Pella, capitale de la Macédoine.  

Les changements géographiques

De plus, à côté de cette chronologie fallacieuse, le pseudo-Callisthène introduisit une nouvelle géographie des conquêtes alexandrines. Celles-ci auraient commencé à Rome et non en Orient. De la sorte, l'Egypte, alors conquise par les Romains, prenait une revanche morale sur ses conquérants. Soucieux d'affirmer l'universalité de l'entreprise alexandrine, le pseudo-Callisthène promène son héros à travers les limites de l'oikoumenê, agrémentant chacun de ses déplacements d'une aventure merveilleuse. Ainsi, à l'Est (en Inde), Alexandre rencontre les sages brahmanes et s'entretient avec eux de la vie et de la mort, de la royauté et de la puissance. Au Nord (dans le Caucase), il affronte Gog et Magog, forces du mal qu'il parvient à contenir derrière un mur de fer. A l'Ouest, il va jusqu'aux îles Fortunées où il plonge dans les abysses. Tous ces voyages et ces récits sont repris et enjolivés dans les versions postérieures de ce premier «roman» d'Alexandre.  

Les récupérations  

Les juifs En Orient, pendant que le mythe s'ancre dans les mentalités populaires et s'enrichit de nouvelles fables, les juifs, dans une démarche revendicative, annexent à leur tour le héros macédonien. Le pseudo-Callisthène leur a déjà ouvert la voie, narrant une rencontre entre le Macédonien et le grand prêtre de Jérusalem. Le Talmud - ouvrage de littérature rabbinique -, reprenant cette tradition, fait d'Alexandre un héros sémitique, défenseur et propagateur de la religion du Dieu unique.  

Les chrétiens Faisant leur propre lecture du pseudo-Callisthène, les chrétiens d'Orient y trouvent à leur tour matière à exégèse. Le syriaque Jacques de Sarudj, dans une homélie métrique datée de 514, insiste tout particulièrement sur le voyage au pays des ombres et la construction de la muraille destinée à contenir les assauts de Gog et Magog. Ces deux missions «divines» sont à ses yeux la marque de la prédestination d'Alexandre. Cette version syriaque du pseudo-Callisthène est suivie d'autres, araméenne, copte, géorgienne, éthiopienne, indienne et même malaise. Toutes amplifient à souhait les exploits d'un Alexandre surhomme et à la limite du divin.

 
Au VII
e siècle, ce fut au tour de l'islam d'aborder l'épopée alexandrine. La sourate de la caverne mentionne Dul-Qarnaïn, dit «le Bicornu» - surnom qui proviendrait de la représentation d'Alexandre avec les cornes d'Amon sur les monnaies hellénistiques - ainsi que Gog et Magog, qualifiés par la Bible d'ennemis de Dieu. Au Xe siècle, des historiens musulmans, tels que Tabari et Masudi, élargissent les conquêtes d'Alexandre à la Chine et au Tibet; le second cite également une tradition faisant de Dul-Qarnaïn le descendant d'un conquérant yéménite. A la même époque, l'Iranien Firdousi, par orgueil national, fait d'Alexandre un fils naturel de Darius. Deux siècles plus tard, Nizami rétablit la filiation véritable de «Iskandar» (nom iranien du Macédonien), mais place l'Iran au centre des aventures alexandrines.  

Alexandre dans l'Occident médiéval

Pendant ce temps, en Occident, l'histoire d'Alexandre connaît une actualité nouvelle. Dès le Xe siècle, un homme d'Eglise, l'archiprêtre Léon, écrit un attrayant récit de l'épopée alexandrine. Son Histoire des batailles sert de point de départ à d'autres compositions, telle la Chanson d'Alexandre du prêtre allemand Lamprecht (vers 1130). Par œcuménisme ou par conviction, ces versions chrétiennes d'Occident voient elles aussi dans Alexandre l'exécuteur d'une volonté divine. Parallèlement, avec le déclenchement des croisades, la féodalité se saisit de l'épopée, à laquelle elle donne un caractère à la fois mystique et temporel. Ainsi, dans l'Alexandreis de Gautier de Lille (XIIe  siècle), le Macédonien apparaît comme le prototype du chevalier courtois.

Mais dans la France du XIIe   siècle, l'œuvre la plus populaire est le Roman d'Alexandre des trouvères Lambert le Tort et Alexandre de Paris (ou de Bernay); ce poème est composé en vers de douze syllabes, qu'on appellera dès lors des « alexandrins » dans l'art de la versification française. Plus tard, la royauté - tout particulièrement sous Louis XIV - privilégia l'image d'un Alexandre conquérant et invincible.
 

Category: DOSSIER HISTORIQUE | Views: 12921 | Added by: sourcedevie | Rating: 0.0/0 |
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